Le Luxembourg se dote enfin d’une nouvelle législation en matière de préservation des entreprises et de faillite

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Après plus de dix ans de procédure législative, la réforme tant attendue du droit de la faillite a finalement été adoptée.

Avec la loi du 7 août 2023 relative à la préservation des entreprises et portant modernisation du droit de la faillite, le Luxembourg dispose donc enfin d’une législation moderne en matière de préservation des entreprises et de faillite. 

Depuis son dépôt en 2013, ce projet de loi a connu de nombreuses étapes et modifications. Il a également dû être amendé à plusieurs reprises afin de transposer la directive (UE) 2019/1023 relative aux cadres de restructuration préventive.

La Chambre de Commerce salue l’adoption de cette importante réforme qui permettra d’offrir aux entreprises de nouveaux outils de réorganisation et qui s’inscrit dans un objectif de promotion d’une « nouvelle chance » pour les entrepreneurs ayant connu une première faillite.

Les principales nouveautés introduites par la loi du 7 août 2023 sont les suivantes :

      1) Instauration de cellules de détection des entreprises en difficultés auprès du ministère de l’Economie et du ministère des Classes Moyennes.

Lorsque ces services, sur base des données à leur disposition (comptes annuels, notifications de licenciements pour raison économique, liste des débiteurs n’ayant pas versé dans les trois mois l’intégralité des dettes de sécurité sociale et de TVA et des retenues sur traitement et salaires, etc…) estimeront que la continuité d’une entreprise risque d’être compromise, ceux-ci pourront inviter le débiteur concerné afin d’obtenir toute information relative à l’état de ses affaires et l’informer sur les mesures de réorganisation à sa disposition.

      2) Mise en place d’une cellule interministérielle d’évaluation des entreprises en difficultés.

Cette cellule sera chargée d’apprécier l’opportunité des assignations en faillite de la part des créanciers étatiques.

      3) Possibilité de nommer un conciliateur d’entreprise

A la demande du débiteur, le ministère compétent pourra désigner un conciliateur d’entreprise en vue de faciliter la réorganisation de tout ou partie de ses actifs ou de ses activités.

      4) Instauration de la procédure de réorganisation par accord amiable

Le débiteur pourra proposer à tous ses créanciers un accord amiable en vue de la réorganisation de tout ou partie de ses actifs ou de ses activités. En cas d’accord sur ce plan de réorganisation, le tribunal pourra homologuer ce dernier en vue de faciliter son exécution.

      5) Instauration de la procédure de réorganisation judiciaire

Cette procédure a pour but de préserver, sous le contrôle du juge, la continuité de l’entreprise et vise :

  • Soit à obtenir un sursis en vue de permettre la conclusion d’un accord amiable,
  • Soit à obtenir l’accord des créanciers sur un plan de réorganisation,
  • Soit à permettre un transfert par décision de justice, à un ou plusieurs tiers, de tout ou partie des actifs ou des activités du débiteur 

      6) Modification de certaines dispositions en matière de faillite.

Le projet de loi modernise également le régime de la faillite en modifiant plusieurs dispositions concernant entre autres :

  • La responsabilité des dirigeants,
  • L’ouverture des dispositions du régime de la faillite aux indépendants et professions libérales,
  • La possibilité pour le failli personne physique d’obtenir du tribunal d’être déchargé de tout ou partie du solde de ses créances nées antérieurement au jugement de faillite. 

      7) Promotion du principe de la « nouvelle chance »

L’une des idées majeures de cette loi est également de promouvoir la « nouvelle chance » afin de ne plus stigmatiser l’échec et accorder à un dirigeant honnête ayant fait faillite une nouvelle possibilité d’entreprendre.

Cette loi, mise en parallèle avec la récente réforme du droit d’établissement[1], contribuera à promouvoir cette « nouvelle chance », même si la Chambre de Commerce a regretté dans ses avis respectifs que le législateur ne soit pas allé encore plus loin sur ce point[2].

La nouvelle loi du 7 août 2023 constitue donc un nouvel outil précieux pour les entreprises et les praticiens du droit de l’insolvabilité et un point positif pour la compétitivité du pays.

La Chambre de Commerce décrira plus en détails les nouveautés introduites par cette nouvelle loi qui entrera en vigueur le 1er novembre 2023 dans d’autres publications et évènements.


[1] Projet de loi n°7989 portant modification de la loi modifiée du 2 septembre 2011 réglementant l'accès aux professions d'artisan, de commerçant, d'industriel ainsi qu'à certaines professions libérales, adopté le 20 juillet 2023 par la Chambre des Députés.

[2] Cf. Avis 4095terSMI de la Chambre de Commerce du 8 février 2023 : « La Chambre de Commerce regrette cependant que les amendements parlementaires ne soient pas allés plus loin en matière de seconde chance, notamment en supprimant la condamnation d’office pour banqueroute simple de tout dirigeant qui n’aura pas fait aveu de la cessation de ses paiements dans le délai d’un mois.

La mise en place d’une vraie seconde chance au Luxembourg devrait selon la Chambre de Commerce se faire conjointement avec la réforme du droit d’établissement en cours, en supprimant le postulat selon lequel « l’accumulation de dettes importantes auprès des créanciers publics dans le cadre d’une faillite ou liquidation judiciaire prononcées » constitue d’office un manquement qui affecte l'honorabilité professionnelle du dirigeant. »