Projet de loi relative à la sécurité générale des produits. (2815BJE)

05.03.2004

Avis & législation

Projet de loi relative à la sécurité générale des produits. (2815BJE)

Par sa lettre du 2 février 2004, Monsieur le Ministre de l’Economie a bien voulu solliciter l’avis de la Chambre de Commerce concernant le projet de loi sous rubrique.

1. Objet du projet de loi

Le présent projet de loi vise à transposer en droit national la directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits[1].

Pour rappel, préalablement à l’adoption de la directive 2001/95/CE, le thème de la sécurité générale des produits était régi par la directive 92/59/CEE du 29 juin 1992 relative à la sécurité générale des produits[2]. Cette première directive est transposée en droit national par la loi du 27 août 1997 relative à la sécurité générale des produits[3].

Suite au rapport de la Commission européenne du 29 mars 2000 sur l’expérience acquise dans l’application de la directive 92/59/CEE[4], la Commission européenne a décidé de donner un nouveau contenu à la réglementation européenne dans ce domaine en élaborant la directive 2001/95/CE, qui remplace la directive 92/59/CEE.

La directive 2001/95/CE reprend les exigences qui figuraient dans la directive 92/59/CEE relative à la sécurité générale des produits et introduit un certain nombre de nouvelles dispositions, parmi lesquelles figurent notamment l’extension du champ d’application de la réglementation sur la sécurité générale des produits aux produits fournis à des consommateurs lors de la prestation de service ; le renforcement des obligations des producteurs afin de garantir que ces derniers coopèrent efficacement avec les autorités nationales compétentes ; l’utilisation plus systématique des standards afin de mettre en œuvre efficacement le concept de sécurité des produits ; le renforcement des pouvoirs des autorités nationales de surveillance du marché ; l’amélioration du cadre de coopération européen en matière de surveillance du marché et d’échange d’information.

En matière de coopération au niveau communautaire, la Chambre de Commerce constate que la Direction de la Concurrence et de la protection des consommateurs du Ministère de l’Economie participe efficacement au réseau européen d’échange d’information RAPEX et au Comité d’urgence instauré par la Commission européenne[5].

En ce qui concerne les autres exigences de la directive 2001/95/CE, les auteurs du présent projet de loi ont choisi de transposer cette directive de manière aussi fidèle que possible en reprenant presque littéralement ses principales dispositions.

D’une manière générale, la Chambre de Commerce peut marquer son accord de principe avec l’approche retenue par les auteurs du présent projet de loi.

2. Commentaire des articles

Concernant l’article 1er

L’article 1er reprend littéralement les termes de l’article 1er de la directive 2001/95/CE et n’appelle pas d’observations de la part de la Chambre de Commerce.

Concernant l’article 2

L’article 2 reprend littéralement les termes de l’article 2 de la directive 2001/95/CE. L’ensemble de ces définitions n’appelle pas d’observations de la part de la Chambre de Commerce.

La Chambre de Commerce relève que la définition d’un « risque grave » est partiellement tautologique puisqu’un risque grave se définit comme « tout risque grave, y compris ceux dont les effets ne sont pas immédiats, qui nécessite une intervention rapide des pouvoirs publics ». Bien que cette définition retranscrive mot pour mot les termes employés par la directive 2001/95/CE, il conviendrait de modifier cette définition et de privilégier la rédaction suivante :

« risque grave » : tout risque, y compris ceux dont les effets ne sont pas immédiats, qui nécessite une intervention rapide des pouvoirs publics. »

Les auteurs du présent projet de loi ajoutent aux définitions prévues par la directive 2001/95/CE celle des « agents » chargés de l’application de la future loi relative à la sécurité générale des produits. Par souci de clarté, la Chambre de Commerce suggère d’ajouter une définition du « Ministre » désigné aux articles 4, 5, 6 et 7 du présent projet de loi. En effet, les auteurs du présent projet de loi font référence au « Ministre ayant la protection des consommateurs dans ses attributions ».

D’après l’arrêté grand-ducal du 11 août 1999 portant constitution des Ministères, la protection des consommateurs relève de la compétente du Ministre de l’Economie[6]. D’après l’actuelle loi du 27 août 1997, c’est le Ministre de l’Economie qui est chargé de l’application de la législation relative à la sécurité générale des produits. Par conséquent, la Chambre de Commerce suggère la formulation suivante :

« j) « Ministre » : le Ministre ayant l’Economie dans ses attributions »

Concernant l’article 3

L’article 3 du présent projet de loi vise à garantir une utilisation plus systématique des standards afin de mettre en œuvre efficacement le concept de sécurité des produits. Parmi les référentiels qui permettent de déterminer si un produit répond à l’obligation générale de sécurité, l’article 3 énumère notamment le respect des exigences nationales et communautaires, des normes nationales non obligatoires, des recommandations de la Commission et des codes de bonne conduite. Pour l’essentiel, l’article 3 du présent projet de loi reprend littéralement les termes de l’article 3 de la directive 2001/95/CE.

En plus de ces nombreux critères, le présent projet de loi autorise le Ministre à restreindre la mise sur le marché ou organiser le retrait ou le rappel d’un produit qui se révèlerait dangereux, alors qu’il serait conforme aux nombreuses règles et normes de référence énumérées aux paragraphes (2) et (3) de l’article 3 du présent projet de loi.

Cette possibilité existe également dans le dispositif de la loi du 27 août 1997 (article 4). Dans son avis lors de l’élaboration de la loi du 27 août 1997, la Chambre de Commerce soulignait qu’« une telle mesure devrait revêtir un caractère exceptionnel et ne devait être envisagée qu’en cas de danger grave, imminent et non hypothétique »[7].

Etant donné les implications d’une mesure d’interdiction de mise sur le marché, de retrait ou de rappel, la Chambre de Commerce insiste sur le fait qu’une telle décision doit reposer sur de solides justifications et s’inscrire dans le plus strict respect du principe de proportionnalité.

La Chambre de Commerce souligne par ailleurs que, dans la pratique, les producteurs et distributeurs coopèrent volontairement avec les autorités administratives afin de garantir la sécurité des consommateurs. D’après le rapport d’activité du Ministère de l’Economie pour l’année 2002, tous les produits dangereux, trouvés sur le marché luxembourgeois et ayant fait l’objet d’une des 152 notifications de produits dangereux adressées au Gouvernement par la Commission européenne, ont été retirés volontairement des rayons par les distributeurs[8].

Concernant l’article 4

L’article 4 du présent projet de loi opère un renforcement des obligations des producteurs et des distributeurs afin de garantir que ces derniers coopèrent efficacement avec les autorités nationales compétentes.

Contrairement à la loi du 27 août 1997 relative à la sécurité générale des produits qui se caractérise par la généralité et l’imprécision des termes employés, le présent projet de loi a le mérite de préciser le rôle des distributeurs, notamment en matière de traçabilité des produits, en particulier « par la tenue et la fourniture des documents nécessaires pour tracer l’origine des produits » (article 4, paragraphe (2) du présent projet de loi).

Pour le reste, l’article 4 reprend littéralement les termes de l’article 5 de la directive 2001/95/CE et n’appelle pas d’observations de la part de la Chambre de Commerce.

La Chambre de Commerce note cependant que le présent projet de loi énumère, parmi les mesures proportionnées que le producteur est susceptible de prendre, « l’examen des plaintes déposées » (article 4, paragraphe (1er) b)) alors que la directive 2001/95/CE fait référence à « l’examen des réclamations » (article 5, paragraphe (1er)). L’utilisation du terme « réclamation » s’inscrit de manière cohérente dans le dispositif du présent projet de loi : l’article 7 fait également référence aux réclamations des consommateurs : les « consommateurs et les autres parties intéressées peuvent présenter, par lettre recommandée, leurs réclamations (…) ».

Etant donné que les auteurs du présent projet de loi ne fournissent aucune justification à ce changement de terminologie, la Chambre de Commerce suppose qu’il s’agit d’une simple erreur matérielle et recommande l’emploi d’une terminologie uniforme.

En matière de coopération, le paragraphe (4) du présent projet de loi énonce que les « procédures de coopérations sont établies par le département du ministre ». Par souci de clarté et de sécurité juridique, la Chambre de Commerce suggère que ces procédures soient adoptées par règlement grand-ducal et fassent ainsi l’objet d’une publication au Mémorial.

Concernant l’article 5

L’article 5 du présent projet de loi détermine les autorités administratives chargées de l’application de la loi (Ministre de l’Economie, officiers de police judiciaire, agents de la police grand-ducale et agents du Ministère de l’Economie). L’article 5 reprend quasi littéralement les dispositions de l’article 7 de la loi du 27 août 1997 relative à la sécurité générale des produits et n’appelle pas d’observations de la part de la Chambre de Commerce.

Concernant l’article 6

L’article 6 énumère les mesures susceptibles d’être prises par le Ministre de l’Economie en cas de risque pour la sécurité des consommateurs et reprend l’ensemble des mesures prévues par la loi du 27 août 1997 relative à la sécurité générale des produits : soumettre la mise sur le marché d’un produit à des conditions préalables ; ordonner une information spécifique pour les personnes susceptibles d’être exposées à un risque découlant d’un produit dangereux ; interdire temporairement tout produit susceptible d’être dangereux ; interdire la mise sur le marché d’un produit dangereux ; ordonner le retrait d’un produit dangereux.

En plus de l’arsenal préexistant, le présent projet de loi permet au Ministre d’ordonner, de coordonner ou d’organiser avec les producteurs et les distributeurs le rappel d’un produit dangereux déjà sur le marché et d’ordonner sa destruction dans des conditions adéquates (article 6, paragraphe (1) f)).

Etant donné la gravité d’une telle mesure, la Chambre de Commerce insiste sur le fait qu’une telle décision doit reposer sur de solides justifications et s’inscrire dans le plus strict respect du principe de proportionnalité.

Concernant l’article 7

L’article 7 du présent projet de loi permet aux consommateurs et à toute autre partie intéressée de présenter ses réclamations au Ministre de l’Economie. La mise en place de telles voies de réclamations directes est conforme aux objectifs de l’article 9 paragraphe (2) de la directive 2001/995/CE et n’appelle pas d’observations de la part de la Chambre de Commerce.

Concernant les articles 8 et 9

 Les articles 8 et 9 du présent projet de loi prévoient des sanctions pénales en cas de non-respect des obligations prévues aux articles 3 (obligation générale de sécurité), 4 (autres obligations des producteurs et obligations des distributeurs) et 6 (décisions du Ministre en matière de risque pour la sécurité des consommateurs) du présent projet de loi.

Les auteurs du présent projet de loi proposent de reconduire les dispositions pénales prévues par la loi du 27 août 1997 et ainsi d’assurer une certaine continuité juridique entre le régime de l’actuelle loi du 27 août 1997 et le présent projet de loi en matière de sécurité générale des produits.

Dans la mesure où de telles sanctions semblent constituer des mesures efficaces, proportionnées et dissuasives au sens de la directive 2001/95/CE, la Chambre de Commerce peut marquer son approbation avec le régime des sanctions pénales prévues aux articles 8 et 9 du présent projet de loi.

Concernant l’article 10

L’article 10 du présent projet de loi abroge la loi du 27 août 1997 relative à la sécurité générale des produits qui transpose en droit national la directive 92/59/CEE. Les auteurs du présent projet de loi ont choisi d’adapter le droit national en matière de sécurité générale des produits suivant le même schéma que le droit communautaire relatif à la sécurité générale des produits.

D’une manière générale, la Chambre de Commerce peut marquer son accord de principe avec l’approche retenue par les auteurs du présent projet de loi.

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Sous réserve de la prise en compte des observations qui précèdent et après consultation de ses ressortissants, la Chambre de Commerce est en mesure d’approuver le projet de loi sous rubrique.



[1] JOCE du 15 janvier 2002, L11, p.4.

[2] JOCE du 11 août 1998, L228/24.

[3] Mém. 1997, p. 2392.

[4] COM (2000) 140 final, non publié au Journal official.

[5] Voir exposé des motifs du présent projet de loi, ainsi que le Rapport d’activité du Ministère de l’Economie, Vol. 1,  2002, pp. 134-136, disponible à l’adresse :

http://www.eco.public.lu/documentation/rapports/rapport_2002_01.pdf

[6] Mém. 1999, p. 2050.

[7] Avis de la Chambre de Commerce, Projet de loi relative à la sécurité générale des produits, 18 mars 1997, doc. Parl. 4257-2, p. 3.

[8] Rapport d’activité du Ministère de l’Economie, Vol. 1,  2002, pp. 135, disponible à l’adresse :

http://www.eco.public.lu/documentation/rapports/rapport_2002_01.pdf


Textes de projet

2815BJE

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