La Chambre de Commerce et la Chambre des Métiers ont rendu cette semaine un avis commun sur le projet de loi n°8634 portant modification du Code de la sécurité sociale et du Code du travail qui entend introduire une réforme du système de pension. Après analyse approfondie et consultation de leurs ressortissants, les deux chambres professionnelles s’opposent au projet, tout en réaffirmant la nécessité urgente d’une réforme structurelle garantissant la soutenabilité du système de pension à long terme.
Si les deux chambres comprennent les préoccupations de soutenabilité qui motivent l’initiative gouvernementale, elles estiment cependant que les mesures proposées, tant en matière de sécurité sociale qu’en droit du travail, sont insuffisantes, inadaptées ou contre-productives au regard des défis structurels auxquels le régime de pensions est confronté.
L’allongement de huit mois des périodes de cotisations d’ici 2030 constitue un ajustement trop marginal pour influencer l’âge réel de départ à la retraite, l’un des plus faibles de l’OCDE. Cette mesure n’apportera qu’un effet financier modeste - et donc insuffisant - pour rééquilibrer le système dans les années à venir.
L’augmentation du taux de cotisation à 25,5% renchérit immédiatement le coût du travail dans un contexte de compétitivité déjà fragilisée, notamment pour les PME et les secteurs exposés à la concurrence internationale. En outre, cette hausse n’apporte, aux yeux des deux chambres professionnelles, aucune réponse structurelle au déséquilibre du régime des pensions, dont les projections montrent clairement la non-soutenabilité à moyen terme. Enfin, cette mesure envoie un signal défavorable aux entreprises et aux actifs, en laissant penser que la réponse aux déséquilibres publics passe avant tout par une hausse des cotisations, au détriment de l’attractivité du pays.
La flexibilisation accrue des années d’études, bien qu’inspirée par la volonté de valoriser la formation tout au long de la vie, va elle-aussi à l’encontre de l’objectif de soutenabilité car elle augmente encore la proportion de périodes non cotisées. Aussi, les deux chambres professionnelles estiment que si l’État souhaite maintenir ces avantages, leur financement devrait relever de son budget propre et non de l’assurance pension, qui repose sur une logique assurantielle.
Les chambres s’opposent finalement à l’introduction d’un régime de pension progressive dans le Code du travail alors qu’un tel dispositif est intrinsèquement lié à la sécurité sociale (branche pension) et qu’aucune plus-value n’est démontrée par rapport à la préretraite progressive et au cumul de revenus avec une pension anticipée. Par ailleurs, ce mécanisme entraînerait une charge administrative et financière disproportionnée pour les employeurs en transférant vers eux la gestion et le paiement d’une indemnité relevant in fine de la sécurité sociale. Sans parler des modalités pratiques envisagées qui présentent par ailleurs des risques d’erreurs, d’insécurité juridique et de complexité pour les salariés eux-mêmes, voire de possibles discriminations entre ces derniers.
Pour les deux chambres professionnelles, force est de conclure que les mesures projetées ne permettent que de repousser marginalement l’apparition des déficits du régime de pensions et que seule une réforme globale, cohérente et structurelle permettra d’assurer la viabilité financière du système de pension, de restaurer l’équité intergénérationnelle et de préserver la compétitivité du tissu économique luxembourgeois.
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