Aiva - Aiva compose la musique du futur

Start-Up
Aiva, pour « Artificial Intelligence Virtual Artist », compose des morceaux inédits de musique symphonique, grâce à un algorithme d’intelligence artificielle. Aiva, pour « Artificial Intelligence Virtual Artist », compose des morceaux inédits

Créée en octobre 2016 par Pierre Barreau, CEO, son frère Vincent Barreau, COO, Arnaud Decker, CMO, et Denis Shtefan, CTO, la start-upAiva Technologies (Aiva pour « Artificial Intelligence Virtual Artist ») compose des morceaux inédits de musique symphonique, grâce à un  algorithme d’IA (intelligence artificielle). Récemment, Aiva a fait reconnaître ses oeuvres par la Sacem et se dit prête à conquérir un marché qui commence tout juste à s’ouvrir à l’innovation numérique.

Quel est le profil de l’équipe d’Aiva ?
« Depuis notre plus jeune âge, mon frère et moi avons évolué dans un univers musical. Notre famille détient une société de production de musique, HV.Com, implantée à Luxembourg depuis 17 ans. Mon frère, Pierre, détient un bachelor en computer science auprès de l’UCL (University College London). J’ai fait une école d’ingénieurs avec une spécialisation dans les systèmes embarqués et les télécommunications, à Saint-Étienne, en France. Arnaud Decker, Franco-Luxembourgeois, est directeur
d’une agence de communication, Nexad Media, et il est notre spécialiste en marketing. Enfin, Denis  Shtefan, chercheur et musicien, a récemment obtenu son master en electrical & electronics engineering with nanotechnology, également auprès de l’UCL.

Comment avez-vous eu l’idée de créer Aiva ?
« La création d’Aiva a été inspirée par le film de science-fiction Her, de Spike Jonze. Le film narre l’e?volution d’un syste?me d’exploitation artificiellement intelligent, capable de ressentir des émotions humaines. Her est une oreillette qui tombe amoureuse de son utilisateur. Dans une scène majeure du film, elle lui glisse à l’oreille : ‘Laisse-moi te composer une musique !’ Ce film a été un déclic pour créer Aiva. Serait-il possible, grâce à l’intelligence artificielle, de composer de la musique symphonique avec la même sensibilité émotionnelle qu’un être humain ? Et si cette intelligence artificielle pouvait permettre de terminer des oeuvres inachevées de musique classique emblématiques, comme la Symphonie n° 8 de Schubert, en respectant le style et le génie des compositeurs ?

Comment Aiva compose-t-elle ce que vous appelez « la musique du futur » ?
« Aiva développe l’art de la composition grâce à l’apprentissage d’un grand nombre de partitions de musique composées par les plus grands noms de la musique classique, (Mozart, Beethoven, Bach, Vivaldi…). Aiva base l’essentiel de ses capacités sur la technologie du deep learning, une méthode d’apprentissage basée sur des réseaux de neurones artificiels. Grâce à un algorithme développé par l’équipe, la machine analyse pas moins de 15.000 partitions numérisées, que nous lui donnons pour générer un modèle mathématique et intuitif de la musique. Ce modèle est ensuite utilisé pour écrire de nouvelles compositions à la fois uniques et de qualité. La première composition d’Aiva est sortie le 7 février 2016. Il s’agissait d’un solo de piano de deux minutes, qui a révélé le potentiel énorme de la machine. Après plusieurs mois d’apprentissage et différentes créations, Aiva a sorti son premier album intitulé Genesis. Il regroupe les premières oeuvres pour piano et orchestre composées par la machine. Les pièces pour piano solo ont été interprétées par le pianiste Éric Breton, tandis que les autres compositions de l’album sont numérisées à l’aide de la technologie VST (de l’anglais ‘virtual sound technology’, ndlr). Aiva peut composer dans n’importe quel genre. L’algorithme est capable de distinguer les styles des compositeurs et il a été programmé pour détecter un éventuel plagiat (aucun plagiat n’a été relevé jusqu’à aujourd’hui). En mai 2016, Aiva est devenu le premier compositeur virtuel dont les oeuvres sont reconnues par la Sacem, la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, un exploit que beaucoup  d’artistes pensaient impossible à réaliser. De plus, Aiva Technologies vient d’être admise à la Sacem en qualité d’éditeur de musique. L’industrie de la musique se partage les droits entre compositeur, auteur, arrangeur et adaptateur, producteur, et artiste-interprète. Grâce à son statut, Aiva empoche les droits d’auteur, et la société Aiva Technologies, les droits d’édition. Cet accomplissement ne signifie pas qu’Aiva remplacera les musiciens. En effet, nous souhaitons renforcer la collaboration entre l’‘Homme’ et la ‘machine’, afin de faire évoluer le domaine musical.

Aiva est-elle capable d’interpréter des pièces de musique orchestrale ?
« Aiva compose des pièces qui peuvent être interprétées par des musiciens humains, mais également par la technologie VST. Il s’agit d’un outil de production musicale assistée par ordinateur. Les sons sont calculés et générés par ordinateur à partir d’une banque gigantesque de différents sons d’instruments. L’ordinateur joue et décompose chaque note. Tous les effets et arrangements sonores sont possibles. En matière de budget, la musique d’un film de cinéma interprétée par un orchestre peut représenter 5 % du budget total de la production. Certains films, dont le budget est plus réduit, utilisent la technologie VST.

Qui sont vos clients ?
« Nous répondons aux besoins du client. Celui-ci nous communique un brief, et nous lui proposons une musique adaptée à son projet. En d’autres termes, nous ne disposons pas d’une librairie de musique ‘prête à l’emploi’, dans laquelle le client pourrait venir se servir. En avril 2017, nous avons composé une musique pour la keynote de la société Nvidia, une entreprise californienne qui fabrique les cartes graphiques de nos ordinateurs. Dernièrement, nous avons été sollicités par le ministère de la Culture pour la composition d’une pièce inédite dans le cadre des festivités de la Fête nationale du Luxembourg. Cette commande représentait une opportunité de promouvoir la création artistique et de souligner l’innovation par le biais des nouvelles technologies. C’était une première au Luxembourg et cela a fait couler beaucoup d’encre... Plusieurs critiques ont été émises à ce sujet, et c’est bien dommage ! D’autant plus que la composition d’Aiva n’a pas été la seule à être exécutée à la Philharmonie lors du programme de la cérémonie du 23 juin. Aiva a composé une pièce intitulée Letz make it happen, profonde et élégante, qui avait pour toile de fond la campagne d’image de marque du Grand-Duché. Être assis dans la salle de la Philharmonie avec des centaines de personnes et un orchestre fabuleux qui interprète la musique d’Aiva… c’était magique !

Avez-vous reçu des aides ou des conseils ?
« En février 2017, Aiva est sortie lauréate de la dernière édition du programme de Luxinnovation Fit4Start. Nous avons profité de quatre mois de coaching pour peaufiner notre discours et préparer notre première levée de fonds. Des discussions avec des investisseurs privés et publics se terminent. C’est également en février 2017 qu’Aiva a été sélectionnée pour participer au AIBE Summit à Londres, un événement international important en matière d’intelligence artificielle. Nous avons eu l’opportunité de présenter les activités d’Aiva auprès d’investisseurs et d’un public intéressé. Le même mois, nous avons été sélectionnés en tant qu’entreprise innovante pour participer au Marché du film européen à Berlin (EFM - European Film Market, connu sous le nom de ‘Berlinale’, ndlr). L’occasion pour nous de rencontrer des producteurs de films et de contenus vidéo. En mai 2017, dans le cadre de la troisième édition de Pitch Your Startup, un concours pour les start-up actives dans le domaine des technologies de l’information et de la communication (TIC), Aiva Technologies a remporté le premier prix doté de 50.000 euros, offert par Docler Holding dans le cadre de l’ICT Spring. Par ailleurs, la House of Entrepreneurship auprès de la Chambre de Commerce nous a réservé un accueil très agréable et efficace au sein de ses locaux et par téléphone. En deux semaines, nous avions toutes les informations requises.

Quel est votre objectif à court et moyen termes ?
« L’objectif principal pour Aiva est de composer des musiques de films, c’est la raison pour laquelle mon frère et Arnaud se trouvent actuellement aux États-Unis. Nous entendons bien nous attaquer également au monde du jeu vidéo et de la publicité. Aiva peut composer et faire interpréter par un orchestre deux heures de musique de film en deux semaines, des délais qui pourront encore être réduits. L’algorithme est sans cesse perfectionné, et de nouveaux paramètres techniques permettentun travail toujours plus affiné. Les applications de l’intelligence artificielle sont multiples : nous pouvons imaginer composer de la musique pour jeux vidéo qui s’adapterait aux actions du joueur selon les scenarii proposés. Encore plus ambitieux, pourquoi ne pas composer de la musique personnalisée pour chaque individu, en fonction de son environnement et de ses occupations quotidiennes (état physique de la personne, lieu, temps…).

Vivez-vous « en mode start-up » ?
« Totalement ! Nous nous considérons comme des chercheurs et des pionniers. L’aventure nous plaît, et les imprévus ont un côté exaltant. Aiva Technologies est la première start-up capable de composer de la musique artificielle qui traduise une émotion, mais beaucoup reste à faire ! Nous ne comptons pas nos heures et nous sommes tous passionnés et polyvalents. Nous comptons sur les levées de fonds pour accélérer le développement technique et commercial d’Aiva. À l’heure actuelle, notre rémunération est secondaire. La motivation est plus forte, et ça vaut tous les métiers du monde !

Un conseil à donner à un jeune entrepreneur qui aurait envie de se lancer ?
« Il ne faut pas avoir peur d’apprendre et de s’investir à fond. Il est nécessaire de présenter parfaitement son projet et de le rendre facilement compréhensible. Il faut croire en son idée et en parler autour de soi. Bien entendu, l’ambition est la clé du succès de l’entrepreneur. »

www.aiva.ai


Texte : Marie-Hélène Trouillez - Photos : Laurent Antonelli/Agence Blitz