Success stories
« Au moment de signer mon contrat en 1998, chez Cargolux à l’époque, on m’avait prévenu que l’aérien était un monde de passion. Cela se vérifie tous les jours. » « Le nom de la société Champ est en fait l’acronyme du logiciel Cargo Han

Champ Cargosystems, ancien département informatique de Cargolux, devenu une société indépendante en 2004, est une belle réussite luxembourgeoise qui fait la synthèse entre secteur aérien, logistique et informatique. Rencontre avec son CEO, Arnaud Lambert.

Comment vos services se positionnent-ils dans la chaîne logistique ?
« Nos solutions informatiques entrent en jeu tout au long de la chaîne logistique faisant intervenir le transport aérien. Elles équipent des compagnies de fret aérien, mais aussi des sociétés de groupage (transitaires), des prestataires de manutention au sol… Elles permettent de suivre des colis d’un bout à l’autre de la chaîne. Au fur et à mesure que la marchandise physique se déplace, l’information, elle, doit être accessible par tous à tout moment et de façon sécurisée. Si à un moment donné une information se perd, c’est comme si la marchandise elle-même était perdue puisqu’elle n’est plus identifiée. Le contexte dans lequel nous opérons requiert de plus en plus de rapidité de traitement, en plus de la sécurité, car les cycles de vente se raccourcissent et tout va toujours plus vite. Champ développe les solutions techniques pour répondre à ces attentes.

Pouvez-vous nous parler des grandes étapes de l’histoire de la société Champ ?
« Le département informatique de Cargolux avait mis au point un logiciel de gestion qui permettait de suivre les opérations d’exploitation, mais surtout, ce qui était totalement nouveau, de mesurer de façon fine la rentabilité de ces opérations. Très vite, d’autres compagnies se sont intéressées à ce logiciel. Il a été vendu à un premier client extérieur, la compagnie mexicaine Aeromexpress Cargo, qui, avec ses horaires décalés par rapport à l’Europe, utilisait les capacités machines de façon complémentaire. Par la suite, pour envisager de gagner d’autres clients sans conflit d’intérêts, il fut décidé de séparer l’activité du reste de Cargolux, en créant une société complètement indépendante. Ce qui fut fait en 2004 et permit de gagner six nouveaux clients immédiatement. La suite de l’histoire est un développement permanent grâce à la valeur ajoutée de nos solutions et aux acquisitions ou alliances avec des partenaires externes : le rapprochement avec la société suisse Sita en 2005 nous a valu 35 nouveaux clients, d’autres ont été gagnés suite à l’acquisition de la société suisse SoftAir en 2008 puis de la société allemande Traxon en 2011, opérations qui nous ont permis d’élargir à chaque fois notre catalogue produits.

Vous avez aussi ouvert un bureau aux Philippines en 2010.
« En effet, c’est une autre grande étape de notre histoire. Nous avons ouvert cette antenne pour contrer la concurrence asiatique. Nous avons choisi Manille, car la population y a un très bon niveau d’anglais et un grand sens du service. La grande culture des voyages des Philippins leur donne une bonne ouverture sur le monde en plus de leur sensibilité européenne héritée d’une occupation espagnole qui a duré trois siècles. Ce bureau compte aujourd’hui 200 collaborateurs qui forment une seule et même grande équipe avec nos effectifs européens avec lesquels ils travaillent quotidiennement par visioconférence. Pour renforcer la cohésion entre tous, nous proposons régulièrement des échanges de mobilité interne entre l’Europe et les Philippines.

Quels avantages concurrentiels tirez-vous du fait d’être une entreprise luxembourgeoise ?
« D’abord, le multiculturalisme de nos équipes. Sur nos sites luxembourgeois, 37 nationalités se côtoient et travaillent ensemble, ce qui est très important pour refléter la diversité de nos clients et interlocuteurs. Ensuite, le fait que le pays est politiquement neutre nous permet d’aborder des marchés partout dans le monde, y compris dans des pays aux contextes compliqués. La proximité que l’on a au Luxembourg avec les autorités nous apporte une aide précieuse pour obtenir certains contacts, qui se rajoute à celle apportée par les ambassades et les attachés économiques. L’image de la maison grand-ducale est également une carte de visite importante dans certains pays qui ont aussi une monarchie et qui se sentent en affinité avec nos valeurs.

Quels sont vos interlocuteurs chez les clients ? Où les rencontrez-vous ?
« Nos interlocuteurs sont souvent des équipes composées d’un responsable fret, d’un responsable informatique et d’un directeur des achats ou d’un directeur financier. Nous nous rencontrons dans le cadre des grands salons  mondiaux du fret aérien ou de la logistique, mais aussi en participant à des missions économiques. Dans notre domaine, les processus sont assez longs. Il faut plusieurs mois pour signer un contrat. Pour les gros projets, cela peut aller jusqu’à 18 mois de négociation. Par la suite, le déploiement des solutionschez le client prend aussi plusieurs mois.
Nous entretenons un dialogue permanent avec nos utilisateurs grâce à une plateforme web sécurisée, une sorte d’extranet. Grâce à cet outil, nous avons accès à la plus grande communauté mondiale d’acteurs de la logistique aérienne. Avec elle, nous développons les standards de demain.

Quelles sont les principales difficultés de votre métier ?
« Elles sont de trois ordres. Tout d’abord, les risques géopolitiques qui peuvent survenir à tout moment et nous obligent à faire une veille permanente sur ces questions.
Ensuite, il faut sans cesse anticiper les changements de réglementation. Nous sommes tributaires des directives européennes, par exemple, et de leur interprétation par les 28 États membres de l’UE.
Enfin, le grand nombre d’acteurs très variés qui interviennent sur une chaîne logistique crée des attentes multiples. Cela nous oblige à segmenter notre offre et à prévoir des réponses aussi bien pour les gros opérateurs que pour des intervenants plus modestes.

Et ses facteurs-clés de succès ?
« Sans hésiter, les équipes. Le facteur humain est capital dans notre métier, qui requiert des compétences en aérien, en informatique, en logistique et en gestion, en plus d’une certaine ouverture au monde et d’un goût pour le multiculturel.
Notre groupe recrute environ 80 personnes par an, dont beaucoup de développeurs. Je leur dis souvent qu’ils peuvent être fiers de leur travail, car chaque ligne de code qu’ils écrivent impacte directement le travail de centaines d’utilisateurs.

Vous dirigez l’entreprise depuis 18 mois, quels souhaits formulez-vous pour sonavenir ?
« Mon souhait pour l’entreprise n’est pas juste de la voir grandir. Mon objectif est plutôt de créer toujours plus de valeur pour nos clients. Ceci dit, nos perspectives sont bonnes et l’entreprise est profitable, ce qui me permet de prévoir un doublement du chiffre d’affaires et du résultat d’ici 2020. Cela va inévitablement impliquer des transformations que je ne veux pas opérer au détriment des employés.
Au contraire, je souhaiterais que tous y trouvent leur compte en termes de développement professionnel et personnel et surtout je souhaiterais que l’on garde cette passion qui est très spécifique au secteur aérien. J’ai conscience que nos métiers sont très exigeants et que les employés s’investissent énormément, donc il faut que la passion entretienne la flamme. En fait, je voudrais que nous réussissions à garder un esprit entrepreneurial, un esprit PME, même si l’entreprise monte en puissance inexorablement. »

Champ en quelques chiffres-clés :

  • 200 clients aériens dans 90 pays ainsi que 4.000 transitaires
  • Plus de 15.000 utilisateurs
  • 500 salariés dans 18 pays, dont 135 au Luxembourg
  • 200 développeurs et analystes
  • 57 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel
  • 20 millions de livraisons par anutilisent des solutions Champ
  • Plus de 300 millions de messages gérés
  • Plus de 1.000 serveurs traitant quotidiennement 16 térabitsde données

www.champ.aero

Texte : Catherine Moisy - Photos : Emmanuel Claude / Focalize