Start-Up

Diversity

Valérie Dubois-Chahmerian gère actuellement 650.000 pièces par an tous clients confondus et a atteint le point d’équilibre pour sa marque Diversity. Il y a trois ans, Valérie Dubois-Chahmerian a lancé sa propre marque Diversity.

Forte d’une expérience de 20 ans en import-export dans le textile, Valérie Dubois-Chahmerian a franchi le pas pour créer sa propre griffe, Diversity. Elle partage sa passion du textile et des voyages avec des fabricants qui l’ont suivie dans son projet pour faire de Diversity une aventure fondée sur une confiance mutuelle et des échanges stimulants.

Peut-on vous définir comme une créatrice de start-up, étant donné votre expérience de près de 20 dans l’import-export textile ?
« J’ai effectivement une longue expérience en import-export dans la branche textile. Je travaille pour de grandes marques de prêt-à-porter et mon activité s’articule autour de trois volets : la conception, la production et la logistique. Poussée par mes fournisseurs, j’ai eu l’idée de créer ma propre marque. Il m’a fallu cinq ans pour étudier le projet et arriver à la création de Diversity. Ma force est d’avoir pu bénéficier de la confiance et de l’expertise de mes fournisseurs.   C’est un précieux gain de temps, mais ça ne garantit ni ne conditionne la réussite du projet !
Aujourd’hui, je propose une collection d’écharpes estampillées ‘No Gender, No Border, No Season’. Le logo orange, couleur de la prospérité et de l’énergie, invite à s’approprier la marque au gré de son imagination. Les pointillés symbolisent le lien entre les cultures… La marque Diversity n’existait pas. Il a fallu la créer, la construire et la gérer. J’ai dû explorer de nouveaux domaines, notamment celui des médias et de la communication. Diversity est devenue en trois ans un des axes de développement prioritaires de l’entreprise. Je me suis autofinancée et aujourd’hui, le point d’équilibre est atteint.

Qu’est-ce qui différencie la marque Diversity et pourquoi le Luxembourg ?
« Diversity est née justement parce qu’elle est ancrée au Luxembourg. Le Grand-Duché est riche en diversité, avec ses différentes cultures qui le composent. Si ma vie s’était faite ailleurs, la marque n’aurait peut-être pas vu le jour. Lorsque j’organise des ventes privées, je prends plaisir à observer les clients, à noter leurs réactions. Comme pour les grandes marques de produits de lessive, j’ai mon panel sur place (rires) !
Je reste aussi convaincue qu’un bon produit doit être ‘bien’ fabriqué et doit avoir du sens. Je connais et respecte le travail de mes partenaires chinois et indiens et les conditions de travail sont bonnes. L’engagement sociétal est un choix et un socle sur lesquels la marque Diversity s’est construite.
Je gère actuellement 650.000 pièces par an. Pour ce qui est des importations et exportations, les marchandises arrivent et repartent par l’aéroport du Findel auLuxembourg. Par sa position géographique, le Luxembourg est une plateforme européenne et internationale. La gestion effectuée par Luxair - Agence en douane en matière de dédouanement des marchandises est remarquable. Une demi-journée suffit pour dédouaner les marchandises, contrôle compris, alors qu’il faut compter entre cinq et six jours en moyenne en Europe ! La marchandise arrive et repart dans les 24 h. Luxair - Agence en douane est un partenaire déterminant de mon activité. Je tiens à le souligner. C’est un avantage concurrentiel.

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
« Après une maîtrise en sciences et gestion à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, j’ai intégré le groupe Alain Manoukian (aujourd’hui Alain Manoukian BCBG Max Azria, ndlr) avec pour mission la coordination du service commercial et du service collection. Il s’agissait pour moi de développer un produit qui se vend bien, de trouver le bon compromis. On retrouve l’idée de cette première expérience derrière Diversity. Contactée par Unibail (aujourd’hui Unibail-Rodamco, ndlr), j’ai été débauchée par ce grand groupe européen spécialisé dans la gestion, la promotion et l’investissement de centres commerciaux. J’avais plus de 500 baux de commercialisation et de recommercialisation à gérer, sachant que la majorité des surfaces de vente étaient des magasins de prêt-à-porter. Je suis arrivée au Luxembourg il y a un peu plus de 20 ans, après avoir saisi une opportunité qui s’est présentée pour développer mon activité d’import-export textile en partenariat.

Quelles sont les difficultés et opportunités que vous avez rencontrées ?
« Une des premières difficultés a été de quitter un grand groupe et une situation confortable pour me mettre à mon compte. À l’époque, si j’avais eu l’appui d’une fédération du type FFCEL, cela m’aurait permis de gérer ces changements dans de meilleures conditions et de vaincre la solitude de l’entrepreneur.
Mais à mon sens, la difficulté majeure réside dans le fait que les objectifs que l’on se fixe doivent être clairs. J’ai travaillé avec Pascale Marchal-Griveaud du cabinet de conseil We & Co qui m’a aidée à visualiser les interactions entre les différents intervenants. Nous avons modélisé les processus pour en établir une cartographie. Avant de lancer Diversity, j’ai demandé un audit de ma société pour tester le projet. Le temps de préparation ne doit pas être un frein à la création du projet, c’est une étape nécessaire.
Je me rends régulièrement à la Chambre de Commerce pour prendre part aux conférences. J’ai pu ainsi entrer en contact avec de nombreux experts. J’ai recueilli des informations très pertinentes en matière d’import-export auprès de l’Office du Ducroire, l’agence de promotion des exportations luxembourgeoises, partenaire de la Chambre de Commerce. PMC Agence textile Sàrl, dont Diversity est issue, a été labellisée ‘ entreprise socialement responsable ’ par l’INDR en 2011 et en 2014. Cette labellisation m’a permis de connaître mon entreprise sous tous ses aspects, d’analyser son fonctionnement et de me poser les bonnes questions.
Quelle que soit sa taille, toute entreprise bien structurée a la capacité d’être performante et de réaliser ses objectifs à l’international !

Comment travaillez-vous à l’international ?
« Je travaille en réseau. La structure est très légère au Luxembourg. Six personnes travaillent au sein de deux bureaux permanents, l’un basé à Calcutta en Inde, l’autre, à Hangzhou en Chine. Ces personnes, payées à la commission, sont en charge du suivi de la production et du contrôle qualité. De plus, je travaille avec des organismes internationaux et indépendants pour les tests produits et les contrôles in situ, tels que Intertek, SGS (Société générale de surveillance), TÜV SÜD… Les marchandises doivent être conformes aux exigences et normes (Reach, Iso…). Je diligente régulièrement des audits sociaux des usines. Mes clients sont de grandes marques de prêt-à-porter et des chaînes de magasins. Je n’ai pas le droit à l’erreur.
D’autre part, je développe de plus en plus le volet ‘conception’ de mon activité. Il y a une dizaine d’années, mes interlocuteurs avaient fait des études artistiques. Ils apportaient les éléments de conception.
Aujourd’hui, ils sont diplômés d’écoles de commerce. Ils me donnent les grands axes de travail et je crée des pré-collections pour leur présenter du ‘prêt-à-vendre’, adapté au positionnement du produit et de la marque.

Quels sont vos projets dans un avenir proche ? Pouvons-nous en parler ?
« Les écharpes Diversity sont distribuées via le shop online www.wear-diversity.com et dans l’espace Buy Bye de l’aéroport de Luxembourg. Bientôt, elles seront présentes dans la boutique Luxembourg House pour ‘Diversity Designed in Luxembourg’ en centre-ville. Dans un deuxième temps, j’envisage de poursuivre mon expansion en Allemagne, au Royaume-Uni et dans les pays scandinaves avec pour double objectif de m’implanter dans les boutiques d’aéroport et les concept stores, plus larges au niveau de l’offre produits. À moyen terme, les pays du Moyen-Orient, les pays d’Asie et les États-unis sont à l’étude. En parallèle, je souhaite renforcer la présence du site internet en Europe.
Je participe aussi à un projet de recherche, intitulé ‘Women’s Collaborative Entrepreneurship’ mené au sein du centre de recherche en économie et en management à l’Université du Luxembourg. L’objectif est de développer et tester un modèle théorique autour des pratiques d’affaires collaboratives des femmes entrepreneures. Les résultats de l’étude seront disponibles en 2016.

Auriez-vous un conseil à donner à d’autres entrepreneurs ?
« Entreprendre, c’est oser ! Il ne faut pas avoir peur de pousser les portes, d’aller chercher l’avis d’experts. Il faut savoir garder le cap, tout en s’ouvrant aux idées novatrices et aux critiques. Quand on se lance, il est nécessaire que les partenaires et les clients soient rassurés. Le projet doit être cohérent pour être convaincant.

Un mot que vous aimez ? Que vous n’aimez pas ?
« J’aime la détermination, je n’aime pas le mot ‘impossible’.

Quel est votre meilleur souvenir professionnel ?
« Il y a quatre ans, j’ai eu une réunion de travail avec mes fournisseurs chinois pour déterminer une nouvelle stratégie commerciale. Nous avions des produits tricotés, mais avec le réchauffement climatique et les ventes en perte de vitesse, j’ai dû les convaincre de faire évoluer le produit vers des articles imprimés ou tissés. J’apportais la conception de nouveaux produits et un portefeuille de clients potentiels. Au bout de deux ans, ils m’ont suivie et ont adapté leurs outils de production.
Nous avons réduit l’impact de la saisonnalité sur la gestion du planning de production et pu intégrer des produits en soie (foulards et cravates) à forte valeur ajoutée. Aujourd’hui, la satisfaction de mes clients est la preuve que nous avons fait le bon choix. »

 

Texte : Marie-Hélène Trouillez - Photos : Gaël Lesure