Enseignement secondaire : la Chambre de Commerce regrette un projet de réforme dilué

Réforme de l’enseignement

Dans le cadre d’une conférence de presse organisée en marge de son assemblée plénière tenue à titre exceptionnel à l’Athenée, la Chambre de Commerce a tiré un premier bilan intermédiaire de la réforme de la formation professionnelle et a commenté le projet de loi portant sur la réforme de l’enseignement secondaire.

Dans son mot d’introduction, le président de la Chambre de Commerce, Michel Wurth, a rappelé que la Chambre de Commerce organise traditionnellement son assemblée plénière du mois de juillet en dehors de son enceinte au Kirchberg. Cette année l’assemblée plénière a choisi de siéger à l’Athenée pour souligner l’importance que la Chambre de Commerce accorde à la formation professionnelle, un secteur dans lequel elle est un des principaux acteurs du pays. Par le biais de son organisme de formation, la « Luxembourg School for Commerce » (LSC), la Chambre de Commerce propose en effet une très large gamme de formations.

Réforme de la formation professionnelle initiale : des mesures correctrices s’imposent

Pierre Gramegna, directeur général de la Chambre de Commerce, a saisi l’opportunité de tenir une assemblée plénière à l’Athenée pour tirer un premier bilan intermédiaire de la réforme de la formation professionnelle initiale introduite en décembre 2008 et pour présenter – en attendant la publication de l'avis officiel de la chambre professionnelle – une première appréciation du projet de loi portant réforme de l’enseignement secondaire.

La réforme des modalités régissant l’apprentissage au Luxembourg, réforme introduite fin 2008 pour moderniser un système d’apprentissage qui resta jusque là régi par un arrêté grand-ducal datant de 1945, s’avère - presque 5 ans après son introduction - avoir été un pas dans la bonne direction, même si dans l’appréciation de la Chambre de Commerce des mesures correctrices s’imposent. Pierre Gramegna a ainsi proposé d’adapter la méthode d’évaluation actuelle en baissant l’obligation d’acquisition de 100% des compétences à 80% dans les matières imposées. Il s'est par ailleurs déclaré favorable à une indemnisation systématique des stages en entreprises, estimant que chaque effort mérite compensation. Comme dernière recommandation, il a proposé de parer aux inadéquations entre les exigences du système modulaire introduit par la réforme et les ressources humaines et organisationnelles disponibles. L’expérience sur le terrain ayant en effet révélé au grand jour le manque de moyens des équipes curriculaires. De manière générale, Pierre Gramegna a souligné l’attachement de la Chambre de Commerce à la formation professionnelle duale et son soutien à toute réforme visant à rapprocher le monde scolaire du monde économique.

Enseignement secondaire : un projet de réforme dilué

Le directeur général de la Chambre de Commerce a ensuite passé au crible le récent projet de loi portant réforme de l’enseignement secondaire et y a trouvé 7 points à critiquer et 4 points à saluer. Pierre Gramegna a notamment regretté que le projet de loi abandonne maintes propositions contenues dans le projet de texte initial qui était largement porté par la Chambre de Commerce. Le projet de loi n’a par exemple pas retenu le principe des classes de raccordement et n’offre ainsi guère de possibilité à un élève plus faible de bénéficier d’une voie de formation dite de « mise à niveau ». La Chambre de Commerce regrette cette situation d’autant plus que le passage de l’enseignement fondamental à l’enseignement secondaire pose des problèmes d’adaptation. 

La Chambre de Commerce a réitéré sa demande d’instaurer une formation économique de base dès la classe de 4e (enseignement classique) et la classe de 5e (enseignement technique),  afin que les élèves puissent s’orienter en connaissance de cause. Force est de constater que le projet de loi n’offre pas cette chance aux élèves. En ce qui concerne la structure de l’enseignement aux classes supérieures pour les deux ordres d’enseignement, le Ministère de l'Education nationale et de la Formation professionnelle (MENFP) réintroduit de multiples sections aux dépens d’un nombre plus restreint de dominantes. La Chambre de Commerce avait plaidé pour l’introduction d’une dominante « Économie, Gestion et esprit d’entreprendre », cette filière académique étant très prisée par les futurs étudiants universitaires luxembourgeois. Le projet de loi ne tient pas suffisamment compte de cette recommandation.

Les classes supérieures de l’enseignement secondaire technique sont caractérisées par un système de spécialisation avec l’introduction de 5 sections à partir de la classe de 4e et 9 sections dès la classe de 2e. De manière générale, la Chambre de Commerce plaide pour un système de spécialisation simple et transparent. Sachant que l’enseignement secondaire technique prépare aussi à la vie active, il importe d’opter pour des sections en phase avec les besoins en qualification du marché de l’emploi en général et des entreprises en particulier.

Une plus grande importance devrait aussi être accordée à l’enseignement des langues et ce par la création d’un système d’enseignement favorisant l’apprentissage des langues par niveaux pédagogiques. Les niveaux à atteindre concernant la maîtrise des langues seraient idéalement à calquer sur le cadre européen de référence pour les langues (CECR) afin d’offrir aux élèves davantage de flexibilité. Le projet de loi ne répond que partiellement à cette attente dans le sens où il prévoit un apprentissage par niveaux pédagogiques mais seulement à partir de la classe de 4e dans l’enseignement technique, tout en introduisant des niveaux de maîtrise plus exigeants. Cette souplesse au niveau de l’enseignement des langues est abandonnée dans l’enseignement classique suivant le principe du régime à voie unique. La Chambre de Commerce a en outre regretté un autre point. Alors que la proposition de texte prévoyait initialement la création de domaines de compétences aux classes inférieures des deux ordres d’enseignement pour les matières suivantes : mathématiques, allemand, français et anglais, le projet de loi néglige cette piste. Un dernier point critiqué par la Chambre de Commerce concerne l’absence d’un cadre de référence national en matière de qualité de l’enseignement. 

Parmi les mesures à saluer dans le projet de réforme, Pierre Gramegna a relevé les propositions intéressantes formulées en matière d’introduction du tutorat dans les classes de 7e (enseignement classique) et 7e, 6e et 5e (enseignement technique). Il a également salué les mesures d’amélioration de l’orientation scolaire et professionnelle proposées dans le texte.

En guise de conclusion, la Chambre de Commerce a regretté que l’actuel projet de loi ait nettement perdu en pugnacité réformatrice par rapport à la première proposition de texte autrement plus ambitieuse. La Chambre de Commerce regrette ce manque d’ambition à un moment où l’enseignement secondaire nécessite une restructuration en profondeur due notamment aux exigences du monde du travail. Le projet de loi actuel ne répond par conséquent pas aux attentes de la Chambre de Commerce, d’autant plus que les recommandations formulées dans l’avis du 16 mai 2013, lors des « Assises de l’enseignement secondaire » n’ont pas du tout ou trop peu été prises en compte.

Luxembourg School for Commerce : une offre de formation élargie

Fernand Ernster, président du conseil de gérance de la « Luxembourg School for Commerce » a conclu la conférence de presse en rappelant que la Chambre de Commerce est – via son organisme de formation LSC – un des principaux acteurs en matière de formation professionnelle. L’offre de formation de la LSC est basée sur trois piliers. La formation professionnelle initiale (FPI) constitue le premier pilier. Fernand Ernster a rappelé que la Chambre de Commerce gère chaque année quelque 1.700 contrats d’apprentissage et délivre 700 diplômes. La chambre professionnelle a d’ailleurs été le premier acteur luxembourgeois à avoir introduit, dans le cadre de la réforme de loi sur la formation professionnelle, des critères de qualité via la formation des tuteurs.

Deuxième pilier, la formation professionnelle continue (FPC) où la Chambre de Commerce est très impliquée dans la formation des créateurs et repreneurs d’entreprise. Elle offre, entre autres, les formations nécessaires à l’obtention des autorisations d’établissement pour les professions commerciales. Avec la réforme du droit d’établissement, elle a également développé une ligne de formation plus particulièrement destinée aux entrepreneurs ayant vécu une faillite, afin de leur donner une « deuxième chance ». Toute cette offre de formation est regroupée sous le nom de LSC-Entrepreneurship et a compté 1.631 inscriptions en 2012, ce qui constitue une progression de +57% par rapport à 2011.

En matière de formation universitaire (FUN), dernier pilier du programme de formation, la Chambre de Commerce propose depuis récemment des formations diplômantes, alors que les formations certifiantes font depuis toujours partie du bouquet d’offre. La Chambre de Commerce s'est associée avec l'Université du Luxembourg pour créer la « Luxembourg Business Academy » (LBA) qui propose des formations de niveau académique axées sur la gestion d'entreprise, avec notamment le Master en « Entrepreneurship and Innovation ». La Chambre de Commerce entend développer une vraie « Business Education » au Luxembourg, et ce en coopération étroite avec l’Université du Luxembourg.

Afin de sensibiliser les jeunes générations aux concepts économiques de base et aux valeurs de l’esprit d’entreprise, la Chambre de Commerce a par ailleurs étoffé son offre de formation par le programme « Relation Ecole-Entreprise », un programme taillé sur mesure pour les élèves du cycle supérieur de l’enseignement secondaire et secondaire technique. Ce programme innovant se compose de deux ateliers (macroéconomique et microéconomique) qui exposent en une demi-journée l’histoire économique du Luxembourg, le fonctionnement général de l’économie et les opportunités offertes par la création d’entreprises. Lors de chaque séance, ce dernier point du programme est illustré par le vécu d’un entrepreneur expérimenté qui relate son parcours personnel aux étudiants et répond à leurs interrogations sur les opportunités et risques inhérents à un projet d’entreprise. Les enseignants intéressés peuvent s’inscrire auprès de la Chambre de Commerce.