Bien écouter les entrepreneurs, l’impératif de tout pays compétitif !

Affaires économiques

IMD World Competitiveness Yearbook 2019

Evolution du classement général du WCY en un clin d’œil

L’édition 2019 du World Competitiveness Yearbook (WCY) de l’institut suisse IMD[1], révèle que le Luxembourg recule d’une place par rapport à 2018 et se situe au 12è rang du classement. Etre reconnu comme la 12ème économie la plus compétitive, sur 63 pays du monde entier est une bonne performance en soi, mais cela ne suffit malheureusement pas pour être l’un des leaders européens de la compétitivité. Le Luxembourg est le 7ème pays européen le plus compétitif. Mieux écouter les entrepreneurs pourrait être la clé pour améliorer ce classement. Les chefs d’entreprises plaident en effet pour un cadre qui soit à la fois prévisible et dynamique. Ce cadre, avant tout favorable à l’entrepreneuriat, doit prendre appui sur un régime fiscal attractif à l’international et un environnement légal et administratif efficient. Il doit aussi permettre d’attirer et de retenir les talents, essentiels à la compétitivité des entreprises. Ces éléments sont ceux qui ont permis au Luxembourg de devenir l’une des économies les plus productives au monde. Il s’agit donc de cultiver ces fondamentaux, et surtout, par l’écoute continue des entrepreneurs, de ne pas s’en écarter.

L’évolution du classement général du WCY en un clin d’œil
Le Luxembourg s’éloigne du top 10, dont il avait fait partie en 2015 et 2017. Il reste performant sur le plan économique, malgré un rattrapage des autres pays en ce qui concerne la richesse économique par habitant, et constitue avec quelques autres le modèle de la petite économie compétitive et ouverte à l’international. Le Grand-Duché joue un rôle important pour les échanges de services commerciaux, financiers notamment, et bénéficie d’une main-d’œuvre qualifiée et internationale au même titre que de la stabilité de son cadre institutionnel. Toutefois, sa compétitivité semble lentement s’éroder sur certains aspects : fiscalité, coût du travail, prix des bureaux, qualité des infrastructures, etc. Ces points d’attention sont mis en avant par les indicateurs statistiques utilisés dans l’étude de l’IMD et par les réponses à l’enquête adressée aux chefs d’entreprises luxembourgeoises.

Le dynamisme économique, vanté par les dirigeants d’entreprises, passera par de nouvelles niches de croissance et un rebond de la productivité, que pourrait permettre une transition réussie vers une économie digitalisée et durable. Libérer les capacités d’innovation des entrepreneurs et faire du Luxembourg une terre d’épanouissement pour les talents, telle doit être le leitmotiv. Construire des cadres institutionnels, fiscaux et de protection sociale pour permettre la croissance de demain par l’innovation, tels sont les impératifs. Ce sont les défis à affronter pour que le Grand-Duché fasse office de catalyseur pour les entrepreneurs, alors que de grands progrès restent à accomplir en termes d’infrastructures technologiques et scientifiques, d’attractivité des talents ou encore de développement de l’Université.

Les trois pays les plus compétitifs en 2019, Singapour, Hong-Kong, et les Etats-Unis sont tous reconnus pour leur écoute des besoins des entrepreneurs. Ceci ne saurait être un hasard. Ces pays sont suivis dans le top 10 par la Suisse, les Emirats Arabes Unis (qui étaient seulement 15ème en 2016), les Pays-Bas, l’Irlande (en progression de 5 places), le Danemark, la Suède et le Qatar. Le Luxembourg est 5ème parmi les Etats membres de l’Union européenne mais quitte le top 10 des pays de moins de 20 millions d’habitants (11ème).

Concernant les principaux piliers du classement IMD, les performances économiques, tout d’abord, demeurent le pilier de la compétitivité pour lequel le Luxembourg est le mieux positionné, avec à nouveau une 4ème place en 2019. Le pays est toujours dans le top 5 pour des indicateurs comme  le « commerce international » et les « investissements internationaux ». La faible croissance de la richesse réelle par habitant, en lien avec celle de la productivité, continue à peser sur la compétitivité globale du pays. Le marché du travail est toujours orienté à la hausse et profite des  nombreux frontaliers. Les prix continuent à augmenter plus qu’ailleurs, pesant à la fois sur la compétitivité-coûts des entreprises et sur la qualité de vie des résidents.

Le Luxembourg gagne 7 places pour l’efficacité des pouvoirs publics. Cette progression est principalement due au cadre sociétal marqué par le faible écart de revenus entre hommes et femmes, et à une diminution des inégalités de revenus entre les résidents (selon le coefficient de Gini). L’amélioration à court terme des finances publiques permet au Luxembourg de se situer à la 6ème place dans ce domaine. La récente hausse exceptionnelle des recettes, qui a contribué à cette amélioration, incite toutefois à rester prudent sur les futures dépenses publiques à engager. La compétitivité fiscale reste inquiétante, le Luxembourg restant au-delà de la 40ème place. Des progrès restent encore à accomplir pour simplifier les procédures de création d’entreprises.

L’environnement des affaires tend à se détériorer au Luxembourg d’après l’IMD, avec un recul du classement dans tous les aspects de ce pilier. Si le Grand-Duché demeure le pays le plus productif pour les services (valeur ajoutée produite en parités de pouvoir d’achat (PPA) par emploi), une attention particulière doit être portée aux autres pans de l’économie. L’industrie luxembourgeoise n’est en effet que 32ème selon ce même indicateur de productivité. Une amélioration de cet indicateur passera par le développement d’entreprises industrielles à haute valeur ajoutée et par une plus grande utilisation des outils digitaux. L’épée de Damoclès se situe au niveau de l’évolution du coût du travail dans l’industrie : les coûts unitaires de la main-d’œuvre continuent à augmenter plus fortement que dans les autres pays. Le mécanisme d’indexation ne saurait y être étranger.

Le dernier pilier de la compétitivité, les infrastructures, semble être - assez contre-intuitivement - le maillon faible de l’économie luxembourgeoise. Ceci s’explique notamment par le fait que le terme  « infrastructures » ne fait pas exclusivement référence aux infrastructures « matérielles », mais avant tout aux infrastructures immatérielles ; véritable moteur de la croissance dans un pays ouvert et fortement développé. Le Luxembourg se situe ainsi respectivement aux 37ème et 27ème places pour les infrastructures technologiques et scientifiques, en raison notamment d’une difficulté à recruter ingénieurs et chercheurs, et d’un système éducatif moins orienté sur ces disciplines que dans certains autres pays. En revanche, les infrastructures de base et le système de santé sont dans l’ensemble de qualité au Luxembourg. Les politiques ambitieuses en matière de protection de l’environnement nécessiteront encore un peu de temps avant l’observation de progrès majeurs dans les indicateurs.

Les cinq premiers « key attractivness indicators » du Luxembourg sont identiques à ceux de 2018 selon les entrepreneurs interrogés :

  • « Policy stability & predictability »,
  • « Dynamism of the economy »,
  • « Business-friendly environment»,
  • « Competitive tax regime» et
  • « Effective legal environment ».

Par ailleurs, la main-d’œuvre qualifiée est un facteur important d’attractivité pour plus d’un tiers des entrepreneurs interrogés.

Consulter l'intégralité de l'étude dans le document ci-dessous

 


[1] Depuis 1989, l’institut suisse IMD (International Institute for Management Development) analyse la compétitivité de plus de 60 pays. Le classement est basé tant sur des indicateurs statistiques (hard data) que sur l’opinion des décideurs économiques et des dirigeants d’entreprises, enquête coordonnée par la Chambre de Commerce pour le volet luxembourgeois. Plus précisément, l’enquête IMD repose sur l’examen de 235 indicateurs rassemblés sous quatre piliers, à savoir les performances économiques, l’efficacité des pouvoirs publics, l’environnement des affaires et la qualité des infrastructures.