Success stories
Erick Durand. Fondateur, Alma Solar En 2015, Erick Durand a créé sa propre marque de panneaux solaires, I’M Solar Aujourd’hui, Alma Solar traite 6000 commandes par an, livrées en 5 jours ouvrés en moyenne. Depuis un entrepôt de 2000 m2 situé

Erick Durand est bien dans son époque. Il pense et il agit rapidement. Ainsi, à 23 ans il a créé sa première entreprise dédiée à la distribution de panneaux photovoltaïques, qu'il n'a cessé de repenser et d'améliorer, on pourrait dire " augmenter ", pour en faire un véritable groupe, 9 ans plus tard. Pour l'aider dans ce projet il peut compter sur une constellation d'indépendants, aussi énergiques que lui.

Erick, pouvez-vous nous parler de votre parcours et nous dire ce qui vous a amené à créer Alma Solar en 2011 ?

J'ai fait mes études à Saint Etienne, en France. J'y ai suivi une formation d'ingénieur en alternance, pour partie à l'école des mines et pour partie au sein du site grenoblois d'Air Liquide qui, à l'issue des trois années du cursus, m'a proposé un poste au siège parisien de l'entreprise. J'ai refusé cette opportunité car je ne voulais pas vivre à Paris, et je suis retourné à Aix en Provence dont je suis originaire. Là, je suis entré un peu par hasard dans une startup qui distribuait des panneaux solaires, dont j'avais rencontré le patron en jouant au golf. J'étais leur premier salarié, affecté au service commercial. Mon salaire était modeste mais j'étais intéressé aux ventes réalisées. Je me suis découvert un véritable talent de vendeur et j'ai doublé le chiffre d'affaires de la petite société en un an. J'ai assez vite compris cependant que les perspectives d'évolution seraient limitées par la forte concurrence venue de Chine et d'ailleurs. De plus, c'était un marché très dépendant des aides étatiques, qui pouvait donc se retourner en cas de suppression ou de baisse de ces aides. J'ai donc décidé de me lancer à mon propre compte mais dans un autre pays. J'ai baptisé ma société Alma Solar en clin d'oeil à Air Liquide qui m'avait proposé mon premier job et dont le siège parisien était situé près du pont de l'Alma. Les fournisseurs avec lesquels j'avais travaillé dans la petite entreprise d'Aix m'ont suivi. Ils connaissaient mon engagement et ma motivation et me faisaient confiance. Or, c'est un énorme avantage de pouvoir travailler en direct avec les fabricants car cela permet d'obtenir de bons prix et de pouvoir afficher des tarifs très concurrentiels. Je partais donc avec un bel atout.

Pourquoi avoir choisi le Luxembourg pour créer Alma Solar ?

Je souhaitais créer mon entreprise sur un marché francophone, où la concurrence n'était pas encore très active. Monbusiness model était basé sur un shop on line car j'avais étudié la façon dont les clients s'informent dans ce secteur et il s'avère que plus de la moitié trouve leur fournisseur par recherche internet. Il fallait leur expliquer l'avantage de commander en ligne car il n'existait aucun distributeur solaire online auparavant. Mon site a été d'emblée conçu en 5 langues pour cibler des clients partout en Europe. Je souhaitais donc m'implanter dans un pays reconnu comme carrefour logistique, d'où il serait facile de livrer tous les autres. Le Luxembourg réunissait ces conditions.

Et ça a marché tout de suite ?

 En fait, au démarrage, les clients sont forcément rares. Quand quelqu'un appelait ou prenait contact via le site pour prendre des renseignements, je déployais mes meilleurs arguments et faisais des relances très suivies jusqu'à la prise de commande. Au début, je réalisais une vente par semaine, puis petit à petit une par jour et aujourd'hui nous en sommes à 6.000 commandes par an, en provenance de 32 pays, et je suis leader en France et en Belgique. Je ne me suis pas versé de véritable salaire pendant quatre ans. Je préférais injecter chaque euro gagné dans le développement de l'entreprise et en particulier dans le stock. Au début, j'étais contraint de faire livrer les clients directement par les fournisseurs (drop shipping). Il pouvait m'arriver de devoir coordonner des livraisons venant de trois fournisseurs, situés dans trois pays, l'un pour les panneaux solaires, un autre pour l'onduleur (appareil électronique permettant de convertir une tension continue en courant alternatif, ndlr) et un troisième pour les fixations, et cela nécessitait beaucoup de suivi pour que tout arrive en même temps chez le client final. C'est pourquoi la maîtrise du stock est très importante. Aujourd'hui encore, j'investis beaucoup dans ce poste. Outre le confort que cela apporte, cela permet surtout d'être réactif et de réduire les délais de livraison pour satisfaire mes clients.

Vous avez fait évoluer l'offre de l'entreprise. Comment et pourquoi ?

En effet, après être resté exclusivement un distributeur de matériel photovoltaïque de 2011 à 2015, j'ai voulu compléter l'offre en amont et en aval. J'ai donc d'abord lancé ma propre marque de panneaux solaires, I'M Solar, en partenariat avec une usine en Lituanie. Grâce à mon expérience de plusieurs années sur le marché, j'ai pu m'engager sur un volume garanti, en contrepartie du respect strict de mon cahier des charges. Ensuite, en 2018, j'ai lancé Workee, la marque dédiée à l'installation. Partout où je vends des panneaux, j'identifie les meilleurs installateurs et je les inclus dans mon offre pour proposer un service complet à mes clients. La fabrication et l'installation sont opérées avec des marques différentes pour pouvoir être proposées à d'autres partenaires et vendues sur d'autres sites que le mien.

Votre entreprise est entièrement digitalisée et vous en êtes le seul salarié. Vous pensez que c'est un modèle d'avenir ?

Quand ma société s'est développée, j'ai commencé à constituer une équipe en recrutant des salariés. Malheureusement, j'ai été confronté coup sur coup à des " erreurs de casting " qui m'ont coûté du temps et de l'argent. Devoir me séparer d'un employé qui ne convient pas, peu importe la raison, m'a semblé l'une des choses les plus difficiles et désagréables du métier de chef d'entreprise. J'en ai déduit qu'il fallait s'y prendre autrement et j'ai commencé par automatiser toutes les tâches répétitives, celles pour lesquelles j'avais du mal à garder des gens motivés sur le long terme. Ensuite, j'ai confié toutes les tâches à valeur ajoutée, nécessitant une intervention humaine et non automatisable, à des indépendants ou des prestataires extérieurs, avec lesquels j'entretiens un rapport de client à fournisseur que je trouve personnellement beaucoup mieux adapté à ma personnalité. Quand il y a un problème on se réunit, on en parle, on fait des ajustements et on se comprend en tant que chefs d'entreprise. Ces intervenants ont un contrat de service et sont rémunérés au temps passé. Je les trouve grâce à des plateformes européennes spécialisées qui recensent des freelances dans quasi tous les métiers. Je travaille ainsi avec une équipe qui fonctionne à distance, aux quatre coins de l'Europe. La plupart je ne les ai jamais rencontrés autrement que par Skype ou WhatsApp interposé et ils travaillent ensemble de la même façon. Mais ils sont tous très impliqués car ils ont tous intérêt à ce que cela marche. Ainsi, je n'ai plus de déconvenues de recrutement et le management quotidien est facilité. Le seul critère pour continuer à travailler ensemble est la satisfaction réciproque sur les projets. Beaucoup me disent d'ailleurs qu'ils travaillent avec moi pour le fun car mon entreprise, entièrement automatisée et digitalisée, est un cas assez unique. Pour ma part, je m'occupe exclusivement de l'aspect commercial qui est mon point fort et de la conception du système d'information qui sous-tend toute l'activité de l'entreprise. C'est une organisation souple, qui accompagne facilement les variations d'activité, à la hausse comme à la baisse et qui me fait gagner beaucoup de temps, que j'utilise pour réfléchir à l'amélioration continue du service.

 Quelles sont vos ambitions futures pour Alma Solar ?

En fait je vais continuer à élargir mon offre de services en lançant d'abord Alma Solar Banking, en partenariat avec un acteur de la place financière, pour permettre aux clients de financer leurs projets d'équipements solaires. Et ensuite, je compte lancer Alma Solar Leasing pour pouvoir proposer l'énergie solaire " as a service ". Avec cette option, les clients n'auront plus à s'occuper de rien. Au bout de quelques années, nous remplacerons leur matériel pour les faire bénéficier des derniers progrès technologiques et nous revendrons le matériel plus ancien sur des marchés demandeurs.

Jugez-vous réaliste l'objectif d'atteindre 25% d'énergie renouvelable au Luxembourg en 2030, alors que nous étions à 9% seulement en 2018 ?

Je pense que c'est tout à fait réaliste. C'est un problème de volonté politique. Si l'on exploitait toutes les toitures disponibles, on atteindrait facilement cette cible. La météo n'est même pas un problème au Luxembourg car ce sont les rayons solaires UV qui nous intéressent et ceux-ci traversent les nuages. La meilleure preuve est que l'un des premiers marchés européens pour Alma Solar est la Finlande. Une partie de ce pays est constitué d'îles qui ne sont pas reliées aux infrastructures terrestres du reste du pays et qui vivent très bien en autonomie énergétique grâce au solaire, malgré une météo qui, hormis trois mois de l'année, ne jouit pas d'un fort ensoleillement.

www.alma-solarenergy.lu ; www.alma-solarshop.fr

TEXTE : Catherine Moisy PHOTOS : Emmanuel Claude / Focalize, Alma Solar