Restaurant Bestial / Guy Kirsch - Le goût, tout simplement!

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(De g. à dr.) Edith Stein, International Affairs, Chambre de Commerce; Guy Kirsch et son épouse Nicole, restaurant Bestial, Kirsch le boucher; Carlo Thelen, directeur général de la Chambre de Commerce Excellent boucher-charcutier, la réputation de G

Visite du 20 novembre 2020.

Guy Kirsch est un enfant de la Moselle luxembourgeoise, région plus célèbre pour ses coteaux en pente et ses vignobles que pour ses espèces bovines. Issu d'un milieu modeste, enfant Guy Kirsch passe son temps à courir les champs et les fermes voisines où il apprend à connaître et à aimer les animaux, qu'il suit de la naissance à l'abattage. Un cycle naturel en somme, qui l'amène à travailler comme abatteur, son premier métier, alors que les gamins de son âge sont encore à l'école. Le métier de boucher prend tout aussi naturellement sa place. De l'animal à l'abattage, de la découpe à la transformation de la viande, il n'y a qu'un pas, que Guy Kirsch franchit en suivant une formation de boucher-charcutier, en effectuant son apprentissage et en décrochant son premier emploi chez le célèbre boucher Kaiffer, au coeur de la ville de Luxembourg. C'est là qu'il apprend les bons gestes de l'artisan: la découpe parfaite des viandes, la préparation des charcuteries, des salaisons et fumaisons.

Excellent boucher-charcutier, la réputation de Guy Kirsch s'étend rapidement au Luxembourg. L'occasion lui est donnée d'ouvrir sa première boucherie-charcuterie à Eischen, petit village luxembourgeois où il se fait un nom. Les bonnes pratiques de Guy Kirsch lui valent aussi d'être reconnu par les labels Made in Luxembourg et Produit du Terroir - Lëtzebuerger Rëndfleesch ( la viande de boeuf luxembourgeoise), ce dernier atteste que le cahier des charges fixé par la Chambre d'Agriculture Luxembourgeoise est scrupuleusement respecté.

Outre Eischen, sept autres boucheries-charcuteries s'ouvrent, mais aussi une première aventure en restauration à Hobscheid avec Aal Schoul - L'école du boucher, où ses viandes maturées sont les stars de la carte. En 2019, le dernier grand projet de Guy Kirsch se concrétise, avec l'ouverture de son atelier de production en boucherie et traiteur dans la zone artisanale de Grass, où son second restaurant Bestial, ouvre ses portes. Un succès immédiat pour celui qui ne demande qu'à offrir une nourriture simple et goûteuse sans chichis à ses convives. 

Cinq mois plus tard, la crise sanitaire vient secouer une entreprise qui compte plus de 140 salariés, dont une vingtaine au restaurant Bestial.

Entretien avec Guy Kirsch, boucher-restaurateur.

Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Actuellement, nous essayons surtout de survivre. Nous avons ouvert le restaurant Bestial en octobre 2019 et depuis, nous avons dû affronter un premier confinement, une fermeture totale, un déconfinement sous le joug de mesures sanitaires sévères et aujourd'hui, un nouveau confinement. Mes projets se résument donc à réagir au jour le jour avec le plus de créativité et de réalisme possible, en espérant pouvoir nous en sortir. Je viens de mettre en place un Food-Truck devant le restaurant pour essayer d'occuper quelque peu le personnel. Nous proposons aussi du take-away. Il faut savoir que tout cela est nouveau pour nous et que cela ne s'exécute pas en un claquement de doigts.

Votre plus grande fierté ?

Mon métier de boucher, car c'est toute ma vie. Celui-ci m'a permis de développer ma marque Kirsch le Boucher et de lancer deux restaurants. Le tout offre aujourd'hui de l'emploi à près de 200 personnes dans mon pays. Malgré les difficultés que cela implique, c'est une fierté.

La dernière fois que vous avez douté ?

En ce moment, j'ai de sérieux doutes en ce qui concerne la pérennité de nos commerces, comme tout entrepreneur sensé je suppose. La crise sanitaire nous secoue et bouleverse gravement nos prévisions. J'ai beaucoup investi pour nous permettre de nous développer et le fait de ne pas pouvoir travailler normalement me fait forcément douter de l'avenir.

Avoir un esprit d'entrepreneur, c'est quoi pour vous ?

Croire en son idéal, s'engager pour celui-ci et en vivre. Lorsque je me suis lancé, j'en avais un et il me motive toujours: celui de faire plaisir aux gens en leur offrant simplement ce qu'il y a de meilleur dans leurs assiettes, que ce soit par les restaurants, les boucheries ou le service traiteur de Kirsch le boucher. Cet idéal est toujours présent, mais souvent freiné par les problèmes quotidiens. La gestion d'un restaurant n'a rien de simple et les frais à engager sont très importants par rapport aux gains, même si le restaurant marche bien. La gestion du personnel, de l'administratif, du matériel, ... coûte du temps, de l'énergie et de l'argent. Or, le regard qu'on porte sur l'entrepreneur est impitoyable. Cela peut décourager à la longue, même s'il en faut plus pour m'abattre !

Quel a été l'impact de la crise sanitaire sur votre activité et que pensez-vous que la Chambre de Commerce pourrait faire pour vous soutenir ?

Sans surprise, la crise sanitaire nous a évidemment beaucoup impactés. La perte est énorme. Bestial se trouve dans une zone artisanale et une partie de notre clientèle est depuis des mois en télétravail ou pire, au chômage. La distanciation sociale nous a forcés à réduire le nombre de tables et la fermeture complète du restaurant à trouver des solutions de type take-away ou Food Truck, qui coûtent de l'argent sans en rapporter assez pour permettre de compenser les frais fixes qui eux, continuent de courir ... D'un côté, on nous demande d'être créatifs et de trouver des idées pour conserver l'emploi. De l'autre, on nous bloque (les fameux bâtons dans les roues de l'entrepreneur dont je parlais plus tôt). Deux exemples: le premier concerne l'autorisation d'installer un chalet à l'extérieur du restaurant Bestial pour compenser la perte de tables dans le restaurant: refusée. J'en ai été très déçu, voire choqué. Cette mesure aurait permis de conserver de l'emploi, comme en été, grâce à notre terrasse. Nous avons donc été forcés de licencier du personnel à l'approche de l'hiver. Le second exemple concerne mon incompréhension totale face à l'annonce du gouvernement de l'augmentation du salaire social minimum en 2021. Durant cette crise, de nombreux entrepreneurs ne peuvent même plus se payer de salaire et attendent autre chose de leurs dirigeants qu'un autre couteau dans le dos. J'attends de la Chambre de Commerce qu'elle appuie les entrepreneurs en rappelant aux autorités que nos entreprises offrent de l'emploi qui génèrent des salaires, qui font vivre des familles. Laissez-nous travailler !

Photos: Emmanuel Claude / Focalize