Start-Up

Une start-up n’est pas toujours le fruit de concepts IT sophistiqués. Pour preuve, Luciano Da Conceição Afonso a créé Dogwalker, une société qui propose des prestations sur mesure pour chiens et chats. Aujourd’hui, la jeune pousse compte six employés et des négociations sont en cours avec des partenaires reconnus pour devenir la référence en matière de services aux animaux.

Quel est votre parcours ?
« J’ai une formation en informatique et je suis diplômé de l’école des beaux-arts de Bastogne. Étudiant, j’ai vendu des voitures, travaillé comme styliste pour un photographe et fait un peu de mannequinat. Mon diplôme en poche, j’ai exercé plusieurs métiers avant de créer ma société. J’ai débuté en banque et j’avais un jour libre par semaine pour animer une émission de rock alternatif sur Tango TV, à l’époque. Début des années 2000, j’ai géré le Marx, un bar réputé situé route d’Hollerich, qui accueillait en moyenne 300 clients les grosses soirées. J’avais une équipe de 16 personnes sous ma coupe. J’ai appris à gérer les conflits avec le personnel ou les clients, déterminer les stocks, les flux d’approvisionnement, etc. J’avais une chienne, Chica, qui était toujours avec moi. J’ai quitté le Marx pour travailler pour Luxlait, juste au moment de l’ouverture des Rives de Clausen ! J’ai occupé un poste dans l’export des glaces et des produits laitiers. J’avais pris pour habitude de quitter mon travail assez tôt pour sortir ma chienne et j’avais de nombreux déplacements à l’étranger. En règle générale, il devenait assez compliqué de m’organiser avec ma chienne et je n’étais pas en paix. J’ai donc quitté Luxlait pour aller travailler pour Zap, une petite société d’informatique, où j’ai négocié la présence de ma chienne au bureau.

Comment avez-vous eu l’idée de créer Dogwalker ?
« En septembre 2010, RTL a lancé un appel à projets pour participer à une émission, coproduite avec la Chambre de Commerce, intitulée Success Story. Il s’agissait de présenter de nouvelles idées à lancer sur le marché en vue de créer une entreprise. Une idée d’entreprise avait germé dans ma tête et j’étais assez curieux de savoir comment mon idée serait perçue. J’ai donc participé à l’émission et à ma grande surprise, j’ai été sélectionné pour finalement gagner le premier prix avec ‘Dogwalker’ ! C’est comme cela que tout a commencé. Aujourd’hui, j’ai le sentiment de faire ce que j’ai toujours voulu faire dès l’âge de cinq ans. Depuis toujours, j’adore les animaux !

Que recherchiez-vous lorsque vous avez créé votre société ?
« J’ai toujours cherché un travail qui me permette d’être avec ma chienne, souvent au détriment de mon salaire d’ailleurs (rires). J’ai choisi le Luxembourg pour établir ma société, car je suis né ici et je me sens plus Luxembourgeois que Portugais. Depuis six ans, je n’ai pris qu’une vingtaine de jours de congé et je travaille 7 j/7, week-end compris. Je ne me plains pas… Ce que je fais, je le fais par passion ! Lorsque Dogwalker est né, je n’avais pas de concurrents au Luxembourg, même si le concept existe ailleurs, comme à NYC, par exemple. J’ai adapté la formule et les services pour le Luxembourg.
Au début, nos clients étaient des expatriés, mais entre-temps nous avons tout autant de Luxembourgeois. Les personnes nous confient leurs animaux pour diverses raisons : soit elles travaillent toute la journée, soit elles doivent se faire opérer et ne peuvent pas s’occuper de leurs animaux le temps de leur séjour à l’hôpital, d’autres encore recherchent une vie sociale pour leur chien. Nous constituons les groupes en fonction des affinités entre les animaux.

Comment se passent les journées chez Dogwalker ?
« Nous sommes actuellement six personnes. Chaque nouvel employé commence par un stage d’observation pendant la première semaine. Ensuite, il fait un repérage des lieux. Il faut compter environ un mois avant d’être opérationnel. Chaque année, mes employés suivent une formation avec un vétérinaire. Ils doivent également apprendre le bon contact avec les animaux et faire en sorte que les chiens leur obéissent. Nous prenons six à sept chiens maximum par promenade. Nous exerçons notre métier dans les bois, certes, mais ceux-ci restent des lieux publics et nous estimons que les piétons n’ont pas à subir d’éventuels mauvais comportements de nos chiens. Ce serait d’ailleurs très néfaste pour la réputation de Dogwalker.
Les camionnettes qui les transportent ont été conçues sur mesure. Elles sont climatisées et chaque cage est équipée d’une sortie de secours. J’exige de mes employés qu’ils travaillent sans adresses mémorisées dans le GPS. Je prépare les plannings pour la journée. Chaque matin, ils sont briefés pour quatre missions et prennent quelques notes écrites qu’ils gardent sur eux et qu’ils me rendent en fin de mission. Ainsi, la confidentialité de nos clients est préservée, en cas de vol de la voiture, par exemple, sachant que nous sommes en possession des clés du domicile de nos clients et que nous connaissons leurs horaires. C’est une lourde responsabilité !

Avez-vous rencontré des difficultés et comment les avez-vous surmontées ?
« J’avais une conception assez naïve de mon projet. À mes débuts, j’ai géré ma société uniquement par passion et non comme un chef d’entreprise. La première année a été une catastrophe… Le but pour moi était que chacun puisse profiter des services offerts. Les prix n’étaient pas adaptés et je travaillais à perte, mais je refusais de regarder la réalité en face. Jusqu’au jour où j’ai consulté un conseiller de l’Adem qui m’a fait comprendre que mes tarifs n’étaient pas réalistes. Peu après, j’ai dû me faire opérer en urgence de l’appendicite, car je refusais de m’arrêter… Je ne vivais plus et c’est à ce moment-là que j’ai pris conscience que jene pouvais pas continuer ainsi. Après mon opération, j’ai rappelé mes clients pour leur parler en toute franchise et j’ai décidé d’augmenter mes prix. Le message a été bien perçu et je n’ai perdu qu’un cinquième de mes clients. Tous ont compris que la société devait vivre et m’ont même soutenu dans cette décision. Dès le deuxième exercice, j’ai pu me verser mon premier salaire.
Aujourd’hui, nos tarifs restent très corrects. Il faut compter 369,10 euros par mois, cinq jours par semaine, week-end exclu, pour le ramassage, la promenade et le retour du chien pour un client domicilié en centre ville, et 408,09 euros pour un client dans une commune plus éloignée. Nous pouvons également livrer de la nourriture pour chiens et nous proposons un programme d’alimentation pour les chiens qui auraient du poids à perdre. Depuis la création de Dogwalker, j’ai quelques concurrents au Luxembourg et j’ai pris soin de protéger le nom ‘Dogwalker’ en Europe. J’exerce mon travail de façon plus professionnelle et la passion est toujours là !

Avez-vous des projets ?
« Les projets ne manquent pas ! Nous allons lancer un service de toilettage pour chiens et nous orienter plutôt vers le toilettage thérapeutique. J’avais aussi travaillé dans le dressage de chiens pour le cinéma avec Chica, il y a quelques années, et j’aimerais reprendre cette activité. Dernièrement, j’ai tourné une scène avec un chien pour le dernier film d’Andy Bausch, Rusty Boys ! Enfin, le projet actuel auquel je consacre beaucoup de temps est la création d’une boutique, dans laquelle nous aurons nos bureaux. Des pourparlers sont en cours avec des sociétés leaders en matière de meubles décoratifs haut de gamme et d’accessoires personnalisés pour animaux. Je souhaite obtenir l’exclusivité pour le Grand-Duché. La boutique proposera des services de toilettage et un service de garde occasionnelle. Elle servira également de point de rencontre avec les clients. Nous serons plus flexibles, sachant qu’il y aura toujours quelqu’un pour les accueillir à n’importe quel moment de la journée. La cerise sur le gâteau, c’est la création de la première pâtisserie pour chiens au Luxembourg ! Tous les produits seront confectionnés sur place. Les recettes sont actuellement en phase de test et l’ouverture officielle de la boutique est prévue pour le mois d’avril !

Auriez-vous un conseil à donner à un jeune entrepreneur ?
« J’ai acquis une certaine rigueur grâce à ma société. Le client reste le client et paie pour une prestation qu’il est de mon devoir d’honorer. Je reste aussi persuadé qu’il faut s’investir corps et âme pour réussir. Créer une société uniquement pour faire de l’argent n’est pas stimulant à long terme et n’est en aucun cas source de motivation. Il faut également être prêt à faire des compromis, accepter que la société évolue, peut-être autrement que prévu. Aussi longtemps que votre projet vous motive, vous ne perdez pas votre temps. »

www.dogwalker.lu

Texte : Marie-Hélène Trouillez - Photos : Laurent Antonelli / Agence Blitz